Gaza-ville : la guerre urbaine la plus complexe depuis 1945, analyse et enjeux

Gaza-ville : la guerre urbaine la plus complexe depuis 1945, analyse et enjeux

Contexte et capacités potentielles des forces du Hamas à Gaza-ville

Selon Michael Milshtein, directeur du programme d’études palestiniennes à l’université de Tel-Aviv, la branche militaire du Hamas pourrait compter entre 10 000 et 15 000 combattants à Gaza-ville, avec une part importante nouvellement recrutée.

Gaza-ville, un théâtre de guerre urbaine extrêmement difficile

L’offensive lancée par l’armée israélienne sur Gaza-ville place les forces dans une opération particulièrement complexe, meurtrière et coûteuse, au regard des défis posés par une zone urbaine dense et bien défendue. Certains observateurs estiment que Gaza-ville est devenu le champ de bataille urbain le plus ardu depuis 1945, selon le général américain retraité David Petraeus.

Les analystes soulignent les défis d’affronter « un ennemi sans uniforme » au milieu des civils, ainsi que les enjeux liés à des kilomètres d’infrastructures souterraines — tunnels, postes de commandement et dépôts — et à des immeubles de grande hauteur qui compliquent renseignement, surveillance et frappes.

Conditions du terrain et risques humains

La bande de Gaza est fortement urbanisée et densément peuplée; avant l’offensive, Gaza-ville comptait près d’un million d’habitants. Le paysage urbain intègre des camps de tentes et d’autres abris précaires, souvent installés dans des zones dégagées par les débris des bâtiments démolis par les frappes aériennes.

Les limites des capacités offensives et les défis sur le terrain

« L’avantage militaire est écrasant en apparence, mais il peut être neutralisé par le relief urbain », résume l’expert John Spencer, spécialiste de la guerre urbaine à l’institut MWI de West Point. Le terrain dense amenuise l’efficacité des technologies et complique le renseignement et l’aviation; les combats peuvent se dérouler à très courte distance, où « le premier qui appuie sur la gâchette gagne », selon le colonel Michael Shupp.

Le Commandement du combat futur (CCF) français rappelle que prendre le contrôle des réseaux de tunnels du Hamas demeure un enjeu majeur et rappelle des références comme la bataille d’Azovstal à Marioupol, où 2 000 combattants ukrainiens ont défendu une zone de 12 km² en s’appuyant sur 24 km de galeries souterraines pendant 40 jours et jusqu’à l’équivalent de douze bataillons russes.

À Gaza, l’aviation utilise des bombes anti-bunker (type GBU 28), mais ces munitions atteignent des profondeurs d’environ 30 mètres, alors que certaines portions de tunnels peuvent descendre jusqu’à 70 mètres. Le CCF précise que, pour neutraliser ces tunnels, l’armée recourt aussi à des mesures comme l’inondation et à des « bombes éponges » à base de mousse expansive pour condamner des volumes importants.

Questions humanitaires et dimension informationnelle

Face à ces opérations, les analystes avertissent des risques élevés pour les civils et les otages éventuels, tout en reconnaissant les difficultés liées à une réduction des dommages collatéraux. Certains observateurs évoquent des accusations de “génocide” ou d’urbicide, dans un contexte où la perception internationale joue un rôle clé.

Pour le chercheur Pierre Razoux, interrogé par Le Figaro, l’objectif perçu à Gaza-ville est de pousser la population à partir en rendant la ville invivable, avançant que la logique n’est plus seulement conquérante mais destructive.